VI. Activites et professions diverges
 
 
1 médecin 1 employé de banque
2 instituteurs 4 forgerons
2 prêtres 1 maçon
6 cordonniers 1 greffier au tribunal
3 menuisiers apprentis 1 facteur
7 ouvriers qualifiés dans la constuction 4 menuisiers
3 tailleurs, en été seulement 3 ourvriers électriciens
1 avocat 2 coiffeurs l'hiver et
3 soldats 3 l'été
 

Ajoutons quit y a à Hadeth 13 boutiques dont les propriétaires totalisent, avec leurs familles, 34 personnes.

Mais ces totaux ne doivent pas être considérés indépendamment du reste de la population. La raison est qu'il y a à Hadeth 175 propriétés distinctes et cultivées et que 36 seulement ne sont pas exploitées par leur propriétaire, mais données en métayage.

Deux modalités sont possibles. Le propriétaire offre la terre, l'eau et la moitié de la semence, le cultivateur, son travail et celui de ses bêtes domestiques: la récolte est partagée moitié moitié.

Ou bien, le métayer se charge de tout et n'offre que le quart des produits. Il laboure, fume, séme, moissonne, récolte comme bon lui semble. Sa contribution équivaut à un loyer en nature.

Les 36 families qui ont des revenues supérieures à ceux de la terre ou qui ne peuvent exploiter elles-mémes leur propriété et qui la font cultiver par des métayers sont celles des 5 commerçants les plus riches, 15 artisans et coiffeurs, 1 avocat, 1 médecin, 1 prêtre, 7 émiqrés qui, rentrés chez eux avec une fortune respectable, se permettent de se reposer, 3 veuves qui ont des enfants en bas âge, 3 émigrés qui ont laissé leur femme et leurs enfants qu'ils font vivre par des envois d'argent.

Tous ceux dont le revenu de la terre n'est qu'un appoint, sont au nombre de 117: parents, enfants, et domestiques, soit 13,76% de la population. Leur fortune terrienne représente environ 16% des propriétés foncières de Hadeth. Leur richesse relative s'explique par le fait que l'argent <<attire>> la propriété immobilière, en dépit de tout l'attachement des payans à leurs terrains! Les hypothèques que constituent certains besogneux sur leur sol et qu'ils n'arrivent pas à lever par le paiement de leurs dettes sont la principale source de l'augmentation des terrains des émigrés qui reviennent et qui prêtent de l'argent pour aider leurs compatriotes. C'est l'une des rares façons de forcer le paysan à se séparer de sa terre.

Cela nous montre quelle est l'importance de la part du travail agricole dans notre village. En fait, il n'y a que les 5 commerçants, le médecin, l'avocat, le greffier, les 15 artisans et coiffeurs, le curé, en tout 24 personnes, qui vivent de leur travail actuel, travail non terrien.

De plus, à part l'avocat, le greffier, les trois soldats et, de temps en temps, quelques ouvriers, tout le monde vit au village même: le médecin a sa clinique dans sa propre maison, les deux instituteurs enseignent à l'école officielle, le facteur distribue les lettres au domicile de ses compatriotes.

Les artisans, forgerons, menuisiers et cordonniers rendent les plus précieux services au village.

Les cordonniers du village arrivent à donner satifaction à leur clientèle tout en lui faisant payer les chaussures qu'ils fabriquent moins cher que celles faites à l'avance. Ce qu'ils font dure plus longtemps et épouse mieux la forme du pied. Seule la clientèle fémmine de la classe riche leur fait défaut. Elle s'adresse aux magasins des villes qui importent leur marchandise de France, d'Angleterre, d'Amérique. . .

Les menuisiers fabriquent les armoires des nouveaux mariés, les fauteuils des salons, les battants des portes et les volets des fenêtres avec leurs cadres. Tous les outils sortent de leurs mains: araire, joug, tribulum, fourche, manches de pioche. . .La charpente de la toiture en tuiles rouges est également faite par eux. Leurs ateliers sent équipés à l'électricité. Ils travaillent autant que possible le bois local, surtout le bois de cèdre. Seul le contre-plaqué est acheté à l'extérieur.

Les forgerons ne perdent pas la confiance de leur clientèle non plus. Leurs ateliers sont le rendez-vous de tous les socs qui ont cogné la roche et se sont cassés, de toutes les pioches, les faucilles, les binettes, les serrures. . .fatiguées! Les fusils de chasse et toutes les armes non autorisées par la police1 sont toujours réparés dans leur feu! Les grilles des portils, les barres de fer pour les fenêtres, les rampes des balcons, les gouttières des toitures, les arcs de fer qui servent à tirer le rouleau calcaire sur les terrasses de terre battue, les tuyaux en tôle des poêles à bois, bref tout ce dont la amison ou le champ peuvent avoir besoin sort de leur forge. . .

Quant aux coiffeurs, c'est la clientèle masculine qui assure leur vie. Les femmes de Hadeth n'utilisent pas le fer à friser. Seules fes jeunes filles de moins de 25 ans se font raccourcir les cheveux. . .par leurs amies, parentes ou voisines. . .

Hadeth comprend également quatre hôtels dont un de première classe et trois de deuxième classe. Le premier est de 28 lits. Il est doté d'un bar américain. C'est l'hôtel qu'on rencontre en abordant le bourg du côté de Tripoli. Il fut ouvert en 1950 et jouit d'une vue remarquable sur la Kadicha et Li mer. Son propri&eqacute;taire est de Bécharré et s'intégre petit à petit à la Societe hadethine.

Les autres hôtels, ouverts respectivement en 1928, 1932, 1938, totalisent, ensemble, 51 lits. Le plus ancien est à l'entrée nord-ouest du village, les deux autres dans la montée, au sud de la place.

Une petite auberge, face à l'hôtel de première classe, possède une terrasse. Elle se développe peu à peu et se promet de devenir hôtel un jour.

Deux vastes cafés à l'orientale, à droite de la route en venant du nord, achèvent lai série. Ils sont surtout fréquentés par les estivants de Tripoli qui, en bons rentiers qu'ils sont, ont beaucoup de loisirs, aiment causer doucement en tirant sur le tuyau de leur narguilé...

En dehors des domestiques, personne ne se consacre entièrement à cette petite industrie hôtelière. L'un des propriétaire est le médecin. Les autres sont commerçants ou agriculteurs.

Les boutiquiers mènent une vie au ralenti pendant les mois d'hiver. Ils ouvrent à peine deux heures et demie dans la matinée et une heure et demie l'après-midi: les villageois mettent en reserve, depuis l'automne, tout ce dont ils ont besoin pendant les mois de neige et de froid. Seule la viande fraîche est régulièrement achetée le dimanche et le jeudi.

Les bouchers du village s'en vont eux-mêmes chercher à la montagne le bétail qu'ils mènent à leur abattoir. On les voit discuter avec les chevriers et les moutonniers du prix et du nombre des bêtes. Le fait de les acheter sur place leur permet de les payer moins cher. Le berger résiste mal à la tentation de l'argent qui vient à lui. Il vend, sans se soucier du gain qu'il pourrait réiliser en allant lui-même sur le marché de la viande.

L'hiver, les boucheries ne travaillent que deux jours par semaine, le jeudi et le dimanche. Mais, l'été, pour satisfaire les estivants, on abat des moutons, des chèvres, chevreaux ou boucs, des bœufs, tous les jours.

L'été du village dure, à peu près, 90 jours. La moyenne de bétail abattu est de 7 ovins, 3 caprins, 1 bovin, par jour. La viande, en kilogrammes, est, respectivement et très approximativement: 11.200 + 7.200 + 9.900 = 23.300 kg, pour toute la période des vacances.

L'hiver, la moyenne est réduite à 2 ovins, 5 caprins, 1 bovin, par semaine. Ce qui fait 7.200 + 1.800 + 1.980 = 10.980 kg de viande consommés par les vìllageois qui passent les mois de froid à Hadeth.

Il est curieux de noter que le nombre relatif des caprins abattus en hiver est plus élevé que celui des caprins abattus l'été! Les villageois préfèrent, pour manger de la viande crue en buvant de l'arak, du chevreau à du mouton. On croit encore que la chèvre est plus propre. Les estivants, au contraire, consomment volontiers le mouton.2

La viande se vend au poids sans qu'il soit tenu compte des différentes qualités que les bouchers occidentaux prennent soin de distinguer. Le foie noir de l'animal, surtout s'il est jeune, est très recherché. On le mange cru, au petit déjeuner.

Ce sont les commerçants eux-mêmes qui abattent les bôtes et se font bouchers pour satisfaire la demande locale. Le boucher spécialisé n'est pas encore connu.

Les boutiquiers s'approvisionnent dans les magasins de Tripoli ou de Beyrouth. Dans leurs boutiques, tout s'entasse pêle-mêle, de l'ustensile de cuisine au coupon d'étoffe anglaise ... Ils vendent les produits locaux comme ceux d'importation.  
 



 
1Jusque vers le milieu du sièle dernier, les Libanais portaient les armes pour marcher derrière leurs princes: c'était toute la population qui était mobilisée en cas d'attaque. c'est pourquoi il est bien difficile actuellement de faire perdre aux gens cette vieille coutume. D'où conflits constants avec les forces de l'order et contrebande d'armes prohibées.

2En supposant que la consommation des villageois est plus ou moins la même en été qu'en hiver, nous obtenons pour moyenne de consommation quotidienne par personne: 46,5 grammes. Nous reviendrons plus loin à cette question.